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Et en cest an ensement, Phelippe le Biaux roy de France, tout le temps d’yver visita la terre d’Aquitaine, et les provinces de Thoulouse et d’Albigois[1] avironna jusques atant qu’il venist aus derreniers termes de son royaume et aus contrées des Narbonnois, et les courages de moult, tant du menu peuple comme des nobles et des barons, qui ja estoient esmeuz par le conseil des mauvais, et à par un pou se vouloient de soy deffier, raferma en la grâce de s’amour.[2]Et pour ce que il se monstra à touz liberal, large, favorable et benigne, fu il de eulz grandement et honorablement receuz, et de moult de grans dons, se il les vousist avoir receuz, remuneré, et atrait à li merveilleusement les cuers de tous. Et adecertes, en tant de temps en amour furent envers lui affait et atrait, que il li promistrent loyaument en effect faire li aide de toute leur vertu à leurs propres despens contre touz les adversaires du royaume de France, et meismement contre les Flamens, les quiex le roy proposoit, au temps d’esté ensuivant, derechief guerroier.

Et après ce que le roy venist à la noble cité de Thoulouse, envers aucuns freres de l’ordre des Prescheurs, qui ylec estoient envoiez pour encerchier les herites, se leva et esmut une complainte detestable et diffamable[3]. Car si comme l’en disoit, moult les de-

  1. Philippe le Bel qui était à Toulouse dès le début du mois de janvier 1303, fut à Béziers, à Montpellier et à Nîmes au mois de février. Il rentra à Paris dans la première quinzaine d’avril (Rec. des Hist. des Gaules et de la France, t. XXI, p. 443).
  2. La fin de ce paragraphe est tirée de G. de Nangis, leçon du ms. 70 de Berne. Cf. Mémoires de la Soc. de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, t. XXIII, p. 252-253.
  3. Sur ces plaintes contre les inquisiteurs dans les provinces