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d’Espaigne estoit venu, si comme nous avons dessus dit, qu’il entrast en Arragon[1] et qu’il preist chevaliers et serjans tant comme il vouldroit. Celui Jehan Nougne s’en ala en Navarre et se feri ou royaume d’Arragon, et ardi et prist et roba tout avant lui. Hommes et femmes s’enfuirent devant li et laissierent leurs biens et leurs maisons qui garde ne s’en donnoient de telle venue. Tant ala avant, li et sa gent, qu’il trouverent une tour[2] bien garnie de biens ; si se ferirent enz et roberent quanqu’il trouverent, qu’il n’i laissierent riens ; puis bouterent le feu dedenz et la trebuchierent à terre. Bien est la verité que s’il fussent alez plus avant, il eussent pris tout le royaume, car le roy Pierre ne s’en donnoit de garde ne n’estoit de rien pourveu[3].


XXXVI.
De Gui de Montfort. Incidence[4].

Ainsi comme entour de celle saison meismes, Gui de Monfort filz le conte de Lincestre fu mis hors de pri-

  1. Sur cette expédition qui se termina à la fin de l’année 1283, voir Muntaner, chap. cxi, et Rec. des Hist. des Gaules et de la France, t. XXI, p. 804. Cf. Langlois, op. cit., p. 145-146. Le 28 juillet, Pierre, roi d’Aragon, informait Denis, roi de Portugal, que les Français se préparaient à l’attaquer (de Saint-Priest, Histoire de la conquête de Naples, t. IV, p. 231).
  2. La tour d’Ull (Muntaner, chap. cxi).
  3. La dernière phrase de G. de Nangis n’a pas été traduite : « Sed Philippo et Karolo regibus de Gasconia reversis in Franciam cum legato, rex Franciæ consilio habito pro gente sua, misit, et ut ab incepto desisterent, demandavit. »
  4. Guillaume de Nangis, Gesta Philippi regis Franciæ, dans Rec. des Hist. des Gaules et de la France, t. XX, p. 524-525.