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LA NOUVELLE ÉQUIPE

de Corbeil. L’histoire était la même : propriétaires allemands, farines empoisonnées.

— Toujours le roman-feuilleton, dit Léon, mis en gaieté en dépit des circonstances.

Jeanne et Louise arrivèrent bientôt. Les deux hommes les mirent rapidement au courant des événements de la nuit et du matin.

— Et chez nous ? questionna Maurice.

— Papa est parti ce matin, de très bonne heure, répondit Jeanne. Intentionnellement, nous n’avions pas dit que nous venions vous rejoindre afin qu’il n’eût pas l’idée de nous attendre pour partir, ce qui vous eût mis en présence.

Louise demanda :

— Est-ce que nous allons chez Éliane ?

— Non. Nous lui avons dit que nous n’étions pas fixés sur l’emploi de notre matinée et que nous déjeunerions au restaurant. Il vaut mieux lui éviter la fatigue d’un repas à préparer. Et puis elle préférera être seule avec Julien.

— Où allons-nous alors ?

— Nous avions pensé rendre visite à ce brave Bourdeau qui nous a dit devoir partir demain. Il a trois enfants. Peut-être pourrions-nous lui rendre service.

Jeanne approuva :

— C’est une excellente idée ! Avez-vous son adresse ?

— Oui, c’est boulevard de la Villette. Nous prendrons le métro. Il faut je crois, descendre au Combat.

Jacques Bourdeau, des charpentiers en fer, était chef d’atelier dans une grosse entreprise métallurgique. Fils d’ouvrier, il s’était fait à peu près tout seul. Il s’était instruit de la même manière que tous ces ouvriers intelligents qui, dans les deux décades d’années qui précédèrent la guerre, se rencontraient assez souvent dans la fraction intéressante des travailleurs. Instruction incomplète, cependant, pleine de trous, sans base philo-