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LA NOUVELLE ÉQUIPE

— L’Allemagne est à craindre, dit-il.

— Certainement. Je ne cherche pas à me créer des illusions. Mais enfin, en Allemagne, il y a aussi les socialistes.

Lucien Bournef restait sombre.

— Que peuvent-ils contre le parti du Kaiser ; contre une Allemagne militarisée jusqu’aux moelles ?

— N’exagérons rien, père. Il y a aussi, là-bas, des gens de bon sens.

— Il y en aura trop peu, mon fils. Pour moi, je vois les choses comme elles sont. La Serbie est déjà en guerre avec l’Autriche. La Russie soutient la Serbie. L’incendie est allumé. Nous sommes les alliés de la Russie, notre sort est lié au sien. Nous la suivrons dans la voie où elle s’engage.

Léon gronda :

— Oh ! cette alliance Russe. Au moins Maurice et moi n’avons jamais partagé l’aveuglement général. Nous redoutions qu’elle ne nous entraînat dans une catastrophe dont nous ne serions pas les maîtres.

— Sans doute, fit Lucien Bournef. Mais on s’est engagé. Une nation, comme un honnête homme, doit tenir ses engagements.

Léon protesta encore :

— Une république liée à un empire ! et quel empire !

— Mes enfants, dit gravement le père, il est trop tard, à présent, pour revenir en arrière. Il ne reste plus qu’à faire son devoir : défendre le pays si on l’attaque.

— Sans doute, père, dit Maurice. Mais nous voudrions être sûrs qu’au moins la France ne fera rien pour attaquer ou provoquer l’attaque…

Comme il allait refermer la grille du jardin, l’ancien instituteur fut interpellé par une vieille paysanne endimanchée :