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LA NOUVELLE ÉQUIPE


XI


Les chaleurs de l’été avaient été néfastes à Maurice Bournef. Vers la fin de juillet, de nouvelles hémoptysies étaient survenues. La température, humide et lourde, lui était défavorable. Il perdait ses dernières forces et le sentait bien.

Jeanne voulait le faire partir, l’emmener dans les Pyrénées. Le docteur, qui redoutait le voyage, s’y opposa. Maurice fut de son avis. Il avait compris. Il savait que toute intervention était à présent inutile.

— Docteur, demanda Jeanne, dites-moi la vérité ?

— Hélas ! Madame, c’est la fin. Avec de grands soins, je le mènerai jusqu’à la fin de septembre, jusqu’à la mi-octobre peut-être ; mais il ne passera pas l’hiver.

Le malade, maintenant, gardait tout à fait la chambre. Il ne se levait, dans les meilleurs jours, que pour s’allonger sur sa chaise longue, près du balcon. Jeanne et Henriette, n’ayant plus ni cours ni leçons, ne le quittaient pas. Parfois, cependant, désireux d’être seul avec sa femme, il obligeait sa fille à sortir.

— Tu as besoin de marcher, disait-il. Sois raisonnable et va te promener un peu.

Quelquefois il la priait de descendre lui faire un peu de musique. Le piano était au-dessous de sa chambre, avec les fenêtres ouvertes il entendait très bien.

Un jour il lui dit :

— Pourquoi ne joues-tu jamais l’Adieu de Schubert. Tu sais bien pourtant que je l’aime.

Elle le baisa au front, surmontant sa douleur.

— Je te le jouerai demain, cher papa.

Le mois d’août s’écoulait. Parfois plongé dans ses rêveries, Maurice sortait de son mutisme pour dire :

— Dix ans !… il y a dix ans à présent !