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LA NOUVELLE ÉQUIPE

Maurice Bournef connaissait depuis longtemps les idées de son beau-père. Il les avait combattues. À cette heure sa raison protestait encore. Mais sa conscience avait été atteinte par l’annonce de cette agression.

— Et bien entendu, dit-il, notre frontière du nord n’est pas protégée.

— Elle l’est, mais insuffisamment. Toutes nos troupes de couverture ont surtout été disposées à l’est. Cependant, on avait pris des mesures préventives sur la Meuse. Mais il est évidemment nécessaire que Liège soit en état de tenir jusqu’à ce que nous soyons prêts à lui porter des renforts. Tiendra-t-il ? tout est là.

Jeanne n’avait pas dit un mot. Mais elle était pâle. La guerre, la veille, était encore une réalité d’un ordre abstrait. Elle entrait maintenant dans la réalité des faits.

Le général poursuivit :

— Cette violation du droit va donner une grande impulsion au courage. L’agression contre la Belgique n’est connue encore que des milieux officiels, et cependant elle a déjà motivé quelques gestes magnifiques. Des personnalités éminentes, que leur âge ou leur situation dispensaient de servir, se sont volontairement engagées.

Maurice tressaillit.

— Moi-même, déclara le général, qui n’avais prévu que me rendre utile à l’arrière, j’ai demandé sur le champ à reprendre du commandement.

— Toi, papa, s’écria Jeanne.

— Moi, oui, ma fille. Ce serait une lâcheté de marchander sa vie dans un pareil moment.

— Vous avez raison, général, dit brusquement Maurice ; et d’autres, certainement, vous imiteront.

— Maurice, je suis heureux de vous entendre parler ainsi. Je savais que devant le danger dont la France est menacée, nous nous retrouverions. Je