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LA NOUVELLE ÉQUIPE

dicté notre devoir. Alors, j’ai besoin d’être seul, de réfléchir, de me préparer à l’inévitable.

Léon resta pensif. Lui aussi avait eu les mêmes pensées en écoutant le vieux professeur.

— Écoute, dit-il, rentre avec Jeanne à Ville-d’Avray. Nous deux monterons chez Éliane et y resterons. Si Julien part demain nous serons près d’elle pour adoucir la séparation.

Le visage de Maurice s’assombrit.

— Mon ami, dit doucement Jeanne, j’ai bien encore la force de monter chez Éliane, si tu veux aller l’embrasser.

— Non. Je veux rentrer. Fort probablement je partirai mercredi. J’irai lui dire adieu avant de partir.

Jeanne eut l’impression d’un effondrement dans tout son être. Mais elle se raidit. Depuis qu’elle avait écouté le vieux mathématicien, elle aussi était préparée à l’inévitable.

Maurice comprit ce qui se passait en elle.

— Ma pauvre amie ! dit-il.

Elle éleva vers lui ses yeux pleins de tendresse et répondit doucement.

— Mon cher Maurice !

Sur le terre-plein de la place de la République, les deux ménages se séparèrent, et pendant que Louise et Léon reprenaient la direction du boulevard Magenta, Maurice et Jeanne gagnaient l’entrée du Métro.

C’est alors qu’ils furent témoins d’un spectacle poignant, que ni l’un ni l’autre ne devait oublier.

Deux hommes étaient là, en haut de l’escalier, serrés en une ultime étreinte, le père et le fils. Le fils avait à la main une légère valise.

L’étreinte se desserra, et le père dit :

— Va, mon enfant, et sois prudent. Pense à nous et surtout, surtout, écris souvent (et sa voix trembla)