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LES ANGLAIS AU POLE NORD

son bâton ce sol inconnu. Les pas de Bell s’imprégnaient dans les couches molles ; on les suivait attentivement, et, là où il passait, le reste de la troupe pouvait se hasarder à son tour.

Des traces nombreuses d’ours et de renards se croisaient en tous sens ; mais il fut impossible, pendant cette première journée, d’apercevoir un seul de ces animaux ; les chasser eût été d’ailleurs dangereux et inutile ; on ne pouvait encombrer le traîneau, déjà lourdement chargé.

Ordinairement, dans les excursions de ce genre, les voyageurs ont soin de laisser des dépôts de vivres sur leur route ; il les placent dans des cachettes de neige à l’abri des animaux, se déchargeant d’autant pour leur voyage, et, au retour, ils reprennent peu à peu ces approvisionnements, qu’ils n’ont pas eu la peine de transporter.

Hatteras ne pouvait recourir à ce moyen sur un champ de glace peut-être mobile ; en terre ferme, ces dépôts eussent été praticables, mais non à travers les ice-fields, et les incertitudes de la route rendaient fort problématique un retour aux endroits déjà parcourus.

À midi, Hatteras fit arrêter sa petite troupe à l’abri d’une muraille de glace ; le déjeuner se composa de pemmican et de thé bouillant ; les qualités revivifiantes de cette boisson produisirent un véritable bien-être, et les voyageurs ne s’en firent pas faute.

La route fut reprise après une heure de repos ; vingt milles environ avaient été franchis pendant cette première journée de marche ; au soir, hommes et chiens étaient épuisés.

Cependant, malgré la fatigue, il fallut construire une maison de neige pour y passer la nuit ; la tente eût été insuffisante. Ce fut l’affaire d’une heure et demie. Bell se montra fort adroit ; les blocs de glace taillés au couteau se superposèrent avec rapidité, s’arrondirent en forme de dôme, et un dernier quartier vint