Page:Verne - Voyages et aventures du capitaine Hatteras.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.
178
AVENTURES DU CAPITAINE HATTERAS

— Alors, reprit le docteur, je vois qu’il faut absolument se rabattre sur les ours, et, je l’avoue, c’est bien l’animal le plus utile de ces contrées, car, à lui seul, il peut fournir la nourriture, les vêtements, la lumière et le combustible nécessaires à l’homme. Entends-tu, Duk ? fit le docteur en caressant le chien ; il nous faut des ours, mon ami ; cherche ! voyons, cherche ! »

Duk, qui flairait la glace en ce moment, excité par la voix et les caresses du docteur, partit tout d’un coup avec la rapidité d’un trait. Il aboyait avec vigueur, et, malgré son éloignement, ses aboiements arrivaient avec force jusqu’aux chasseurs.

L’extrême portée du son par les basses températures est un fait étonnant ; il n’est égalé que par la clarté des constellations dans le ciel boréal ; les rayons lumineux et les ondes sonores se transportent à des distances considérables, surtout par les froids secs des nuits hyperboréennes.

Les chasseurs, guidés par ces aboiements lointains, se lancèrent sur les traces de Duk ; il leur fallut faire un mille, et ils arrivèrent essoufflés, car les poumons sont rapidement suffoqués dans une semblable atmosphère. Duk demeurait en arrêt à cinquante pas d’une masse énorme qui s’agitait au sommet d’un monticule.

« Nous voilà servis à souhait ! s’écria le docteur en armant son fusil.

— Un ours, ma foi, et un bel ours, dit Bell en imitant le docteur.

— Un ours singulier, » fit Johnson, se réservant de tirer après ses deux compagnons.

Duk aboyait avec fureur. Bell s’avança d’une vingtaine de pieds et fit feu ; mais