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sur une tombe.

et le produit du vol lui avait permis de porter à Pernau la somme qu’il avait dissipée. C’était la première dette éteinte, mais à quel prix ? Au prix d’un double crime, un assassinat et un vol !

Puis, lorsque tout fut découvert, quand la lumière s’était faite sur cette affaire si obscure jusque-là, lorsque, grâce à leurs numéros, les billets présentés par Wladimir Yanof avaient été reconnus pour être ceux que renfermait le portefeuille de Poch, Dimitri Nicolef, le vrai coupable, Dimitri Nicolef, le meurtrier, s’était frappé du couteau même dont il avait frappé sa victime, d’un seul coup, au cœur.

Le dénouement de cette affaire, cela va sans dire, rendit à l’aubergiste Kroff toute sécurité. Il était temps. Le lendemain, M. Kerstorf se préparait à signer son arrestation. Du moment qu’une ordonnance de non-lieu interviendrait en faveur de Dimitri Nicolef, Kroff serait mis directement en cause. Nicolef ou Kroff, la justice ne pouvait chercher d’autres coupables. On sait d’ailleurs quelles présomptions s’élevaient contre l’aubergiste, et, lorsque le magistrat apprit ce qui s’était passé dans les bureaux de MM. Johausen frères, il ne fut pas un des moins étonnés d’avoir à proclamer l’innocence de Kroff et la culpabilité de Nicolef.

Kroff reprit donc son existence habituelle au kabak de la Croix-Rompue, et sut tirer avantage de cette situation. N’était-il pas comme un condamné réhabilité, après qu’on a reconnu l’injustice de sa condamnation ?… Bref, on en parla quelques jours encore, puis on n’en parla plus.

Quant aux banquiers, s’ils n’étaient pas payés de la dette contractée envers eux par Dimitri Nicolef, ils venaient de récupérer du moins cette somme de dix-huit mille roubles que Wladimir Yanof avait laissée entre leurs mains.

Après l’enterrement du professeur, Ilka et Jean, qui ne devait plus retourner à l’université de Dorpat, regagnèrent leur mai-