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un drame en livonie.

rablement des produits de cette auberge. La maison, le clos, c’était tout ce que leur fils avait hérité d’eux, et la valeur de ce bien n’atteignait pas un millier de roubles.

Là, Kroff, célibataire, sans serviteur ni servante, faisait tout par lui-même, ne s’absentant que lorsqu’il fallait renouveler quelque approvisionnement à Pernau.

Le juge Kerstorf avait toujours conservé certains soupçons contre l’aubergiste. Ces soupçons étaient-ils fondés, et Kroff n’avait-il pas voulu les détourner en accusant le voyageur venu avec le garçon de banque ?… N’était-ce pas lui qui avait fait ces empreintes relevées sur la fenêtre de la chambre, lui qui avait replacé le tisonnier dans l’âtre après s’en être servi pour forcer les contrevents, lui enfin qui avait commis le crime, soit avant, soit après le départ de Dimitri Nicolef, sur lequel, grâce aux précautions qu’il avait prises, devaient se porter les investigations de la justice ?

N’était-ce pas là une nouvelle piste à suivre, et ne conduirait-elle pas au but, si l’on marchait avec prudence ?…

Du reste, depuis que Dimitri Nicolef semblait avoir été mis hors de cause à l’arrivée de Wladimir Yanof, Kroff pouvait craindre que sa situation fût moins nette. Il fallait à tout prix découvrir l’auteur du crime et, dorénavant, l’enquête n’allait-elle pas être dirigée contre lui ?…

Après l’assassinat, on le sait, le cabaretier n’avait quitté l’auberge que pour venir au cabinet du juge d’instruction. Bien qu’il fût libre, en somme, il se sentait très surveillé par les agents de police, de garde, nuit et jour, au kabak.

La chambre du voyageur et la chambre de Poch, fermées à clef, et les clefs entre les mains du magistrat, personne n’avait pu y pénétrer. Les choses étaient donc dans l’état où elles se trouvaient lors de la première perquisition.