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Puis :

« Où sommes-nous ?

― À cinquante milles de la côte du Chili et de l’archipel des Chonas, répondit Robur.

― Merci, mais le vent nous manque, et…

― Nous allons vous donner la remorque !

― Qui êtes-vous ?…

― Des gens qui sont heureux d’avoir pu vous venir en aide », répondit simplement Robur.

Le second comprit qu’il y avait un incognito à respecter. Quant à cette machine volante, était-il donc possible qu’elle eût assez de force pour les remorquer ?

Oui ! et l’embarcation, attachée à un câble d’une centaine de pieds, fut entraînée vers l’est par le puissant appareil.

À dix heures du soir, la terre était en vue, ou plutôt on voyait briller les feux qui en indiquaient la situation. Il était venu à temps, ce secours du ciel, pour les naufragés de la Jeannette, et ils avaient bien le droit de croire que leur sauvetage tenait du miracle !

Puis, quand il les eut conduits à l’entrée des passes des îles Chonas, Robur leur cria de larguer la remorque ― ce qu’ils firent en bénissant leurs sauveteurs, ― et l’Albatros reprit aussitôt le large.

Décidément il avait du bon, cet aéronef, qui pouvait ainsi secourir des marins perdus en mer ! Quel ballon, si perfectionné qu’il fût, aurait été apte à rendre un pareil service ! Et, entre eux, Uncle Prudent et Phil Evans durent en convenir, bien qu’ils fussent dans une disposition d’esprit à nier même l’évidence.

Mer mauvaise toujours. Symptômes alarmants. Le baromètre tomba encore de quelques millimètres. Il y avait des poussées terribles de la brise qui sifflait violemment dans les engins hélicoptériques de l’Albatros, et refusait ensuite momentanément. En ces circonstances, un navire à voiles aurait eu déjà deux ris dans ses huniers et un ris dans sa misaine. Tout indiquait que le vent allait sauter dans le nord-ouest. Le tube du storm-glass commençait à se troubler d’une inquiétante façon.