P’tit-Bonhomme aimait tant… presque ses frères… qui sait si, à l’un d’eux, il ne voudrait pas donner celle qui était presque sa sœur ?… Bref, Grip devint jaloux, affreusement jaloux, et, un certain 9 décembre, il était résolu à en finir, lorsque, ce matin-là, P’tit-Bonhomme, le prenant à part, lui dit :
« Viens dans mon bureau, Grip… J’ai à te parler. »
Grip, tout pâle — avait-il le pressentiment de quelque grave éventualité ? — suivit P’tit-Bonhomme.
Dès qu’ils furent seuls, assis en face l’un de l’autre, le patron des Petites Poches dit à Grip d’un ton sec :
« Je vais probablement entreprendre une affaire assez importante, et j’aurai besoin de ton argent.
— Enfin, répondit Grip, c’n’est pas trop tôt ! D’combien qu’t’as besoin ?…
— De tout ce que tu as déposé à la Caisse d’épargne.
— Prends c’qu’il t’faut.
— Voici ton livret… Signe, afin que je puisse toucher dès aujourd’hui… »
Grip ouvrit le livret et signa.
« Quant aux intérêts, reprit P’tit-Bonhomme, je ne t’en parlerai pas…
— Ça n’vaut pas la peine…
— Parce que, à dater de ce jour, tu fais partie de la maison Little Boy and Co.
— En quelle qualité ?…
— En qualité d’associé.
— Mais… mon navire ?…
— Tu demanderas ton congé.
— Mais… mon métier ?…
— Tu le quittes.
— Pourquoi que je l’quitte ?…
— Parce que tu vas épouser Sissy.
— Je vais épouser… moi… mam’zelle Sissy ! répéta Grip, qui n’avait pas l’air de comprendre.