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p’tit-bonhomme.

— Votre famille ?…

— Je n’ai pas de famille.

— D’où venez-vous ?…

— De la ferme de Kerwan, où j’ai demeuré quatre ans, et que j’ai quittée il y a quatre mois.

— Pourquoi ?

— Parce que le fermier qui m’avait recueilli en a été chassé par les recors.

— Kerwan ?… reprit lord Piborne. C’est, je crois, sur le domaine de Rockingham ?…

— Votre Seigneurie ne se trompe pas, répondit l’intendant.

— Et maintenant, qu’allez-vous faire ?… demanda le marquis à P’tit-Bonhomme.

— Je vais retourner à Newmarket, où j’ai trouvé jusqu’ici à gagner de quoi vivre.

— Si vous voulez rester au château, on pourra vous y occuper d’une façon ou d’une autre. »

Certainement, c’était là une offre obligeante. Cependant, n’imaginez pas que ce fût le cœur de ce hautain et insensible lord Piborne, qui l’eût inspirée, ni qu’elle eût été accompagnée d’un sourire ou d’une caresse.

P’tit-Bonhomme le comprit, et, au lieu de répondre avec empressement, il se prit à réfléchir. Ce qu’il avait vu du château de Trelingar lui donnait à penser. Il se sentait peu attiré vers Sa Seigneurie et vers son fils Ashton, de physionomie railleuse et méchante, et pas du tout vers l’intendant Scarlett, dont le brutal accueil l’avait tout d’abord indigné. En outre, il y avait Birk. Si l’on voulait de lui, on ne voudrait pas de Birk, et se séparer de son compagnon des bons et des mauvais jours, il n’aurait jamais pu s’y résoudre.

Toutefois, cette proposition, alors qu’il était rien moins assuré que de suffire à ses besoins, comment n’eût-il pas vu là un coup de fortune ? Aussi sa raison lui disait-elle qu’il devait l’accepter, qu’il se repentirait peut-être d’être retourné à Newmarket !… Le chien