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p’tit-bonhomme.

Martin Mac Carthy avait deux autres garçons, Pat ou Patrick, Sim ou Siméon, âgés de vingt-cinq et de dix-neuf ans.

Pat naviguait actuellement au commerce en qualité de matelot, sur un des navires de l’honorable maison Marcuart, de Liverpool. Quant à Sim, de même que Murdock, il n’avait jamais quitté la ferme, et leur père trouvait en eux de précieux auxiliaires pour les travaux des champs, l’entretien des bestiaux. Sim obéissait sans jalousie à son frère aîné dont il reconnaissait la supériorité. Il lui témoignait autant de respect que s’il eût été le chef de la famille. Étant le dernier fils, et en cette qualité, celui qui avait été le plus choyé, il était enclin à cette jovialité qui forme le fond du caractère irlandais. Il aimait à plaisanter, à rire, égayant par sa présence et ses réparties l’intérieur un peu sévère de cette maison patriarcale. Très pétulant, il contrastait avec le tempérament plus rassis, l’esprit plus sérieux de son frère Murdock.

Telle était cette laborieuse famille dans l’intérieur de laquelle P’tit-Bonhomme allait être transporté. Quelle différence entre le milieu dégradant de la ragged-school et ce milieu sain et fortifiant d’une ferme irlandaise !… Sa précoce imagination n’en serait-elle pas vivement frappée ?… À cela, nul doute. Il est vrai, notre héros venait de passer quelques semaines dans un certain bien-être chez la capricieuse miss Anna Waston ; mais il n’y avait point trouvé ces réelles tendresses que la vie de théâtre rend si peu sûres, si éphémères, si fugitives.

L’ensemble des bâtiments, servant à loger les Mac Carthy, ne comprenait que le strict nécessaire. Nombre d’établissements des riches comtés du Royaume-Uni sont installés dans des conditions autrement luxueuses. Après tout, c’est le fermier qui fait la ferme, et peu importe qu’elle soit peu considérable par l’étendue si elle est intelligemment dirigée. Observons cependant que Martin Mac Carthy n’appartenait pas à cette catégorie plus favorisée des « yeomen », qui sont de petits propriétaires terriens. Il n’était que l’un des nombreux tenanciers du duc de Rockingham, on pourrait dire