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nord contre sud.

— Toujours parmi les noirs, Perry.

— Mais si les noirs sont libres de ne plus travailler, ils ne travailleront plus !

— Ils travailleront, au contraire, et même avec plus de zèle, puisque ce sera librement, et avec plus de plaisir aussi, puisque leur condition sera meilleure.

— Mais les vôtres, monsieur James ?… Les vôtres vont commencer par nous quitter !

— Je serai bien étonné, mon cher Perry, s’il en est un seul qui ait la pensée de le faire.

— Mais voilà que je ne suis plus régisseur des esclaves de Camdless-Bay ?

— Non, mais vous êtes toujours régisseur de Camdless-Bay, et je ne pense pas que votre situation soit amoindrie parce que vous commanderez à des hommes libres au lieu de commander à des esclaves.

— Mais…

— Mon cher Perry, je vous préviens qu’à tous vos « mais », j’ai des réponses toutes prêtes. Prenez donc votre parti d’une mesure qui ne pouvait tarder à s’accomplir, et à laquelle ma famille, sachez-le bien, vient de faire le meilleur accueil.

— Et nos noirs n’en savent rien ?…

— Rien encore, répondit James Burbank. Je vous prie, Perry, de ne point leur en parler. Ils l’apprendront aujourd’hui même. Vous les convoquerez donc tous dans le parc de Castle-House, pour trois heures après midi, en vous contentant de dire que j’ai une communication à leur faire. »

Là-dessus, le régisseur se retira, avec de grands gestes de stupéfaction, répétant :

« Des noirs qui ne sont plus esclaves ! Des noirs qui vont travailler à leur compte ! Des noirs qui seront obligés de pourvoir à leurs besoins ! C’est le bouleversement de l’ordre social ! C’est le renversement des lois humaines ! C’est contre nature ! Oui ! contre nature ! »

Pendant la matinée, James Burbank, Walter Stannard et Edward Carrol allèrent, en break, visiter une partie de la plantation sur sa frontière septen-