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rencontre inattendue.

cifs de l’île Browse, et que le dernier survivant de l’équipage avait succombé dans cette île.

Entre la fortune de Dolly et Jane, sa seule héritière, il n’y avait plus qu’une mère ayant perdu son enfant, une épouse ayant perdu son mari, et dont tant de malheurs devaient avoir compromis la santé. Ce fut ce que se dit Len Burker. Mais que pouvait-il tenter ? Reprendre les relations de famille avec Mrs. Branican, c’était impossible. Lui demander des secours par l’intermédiaire de Jane, il se défiait, étant sous le coup de poursuites, à la merci d’une extradition qui aurait été obtenue contre sa personne. Et cependant, si Dolly venait à mourir, par quel moyen empêcher sa succession d’échapper à Jane, c’est-à-dire à lui-même ?

On ne l’a point oublié, sept années environ s’écoulèrent entre le retour du Dolly-Hope après sa seconde campagne, jusqu’au moment où la rencontre de Harry Felton vint remettre en question la catastrophe du Franklin.

Pendant ce laps de temps, l’existence de Len Burker devint plus misérable qu’elle ne l’avait encore été. Des faits délictueux qu’il avait accomplis sans aucun remords, il glissa sur la pente des faits criminels. Il n’eut même plus de domicile fixe, et Jane fut contrainte de se soumettre aux exigences de sa vie nomade.

La mulâtresse Nô était morte ; mais Mrs. Burker ne recueillit aucun bénéfice de la mort de cette femme, dont l’influence avait été si funeste à son mari. N’étant plus que la compagne d’un malfaiteur, celui-ci l’obligea à le suivre sur ces vastes territoires, où tant de crimes restent impunis. Après l’épuisement des mines aurifères de la province de Victoria et la dispersion des milliers de « diggers », qui se trouvèrent sans ouvrage, le pays fut envahi par une population peu accoutumée à la soumission et au respect des lois au milieu du monde interlope des placers. Aussi s’était-il bientôt formé une classe redoutable de ces déclassés, de ces gens sans aveu, connus dans les districts du Sud-Australie sous le nom de « larrikins ». C’étaient eux qui couraient les campagnes et en faisaient le