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encore un an.

En réalité, la rencontre de cette épave était un fait qui avait son importance.

C’était la première fois, en somme, qu’un débris du navire perdu venait d’être recueilli. Pour aller chercher le théâtre de la catastrophe, Mrs. Branican possédait maintenant un anneau de cette chaîne qui reliait le présent au passé.

Immédiatement, elle fit apporter une carte de l’Océanie. Puis, M. William Andrew et le capitaine Ellis durent étudier la question d’une nouvelle campagne à entreprendre, car elle voulait que cette résolution fût prise séance tenante.

« Ainsi le Franklin n’aurait pas fait route sur Singapore en traversant les Philippines et la Malaisie, fit tout d’abord observer M. William Andrew.

— Mais cela est improbable… cela est impossible ! répondit le capitaine Ellis.

— Cependant, reprit l’armateur, s’il avait suivi cet itinéraire, comment cette épave aurait-elle pu être retrouvée dans la mer d’Arafoura, au nord de l’île Melville ?

— Je ne puis l’expliquer, je ne puis le comprendre, monsieur Andrew, répondit le capitaine Ellis. Tout ce que je sais, c’est que le Franklin a été vu à son passage au sud-ouest de l’île Célèbes, après être sorti du détroit de Mahkassar. Or, s’il a pris ce détroit, c’est évidemment parce qu’il est venu par le nord et non par l’est. Il n’a donc pu s’engager à travers le détroit de Torrès ! »

Cette question fut discutée longuement, et il fallut se ranger à l’opinion du capitaine Ellis.

Mrs. Branican écoutait les objections et les réponses sans faire aucune observation. Mais un pli vertical de son front indiquait avec quelle ténacité, avec quel entêtement, elle se refusait à admettre la perte de John et de ses compagnons. Non ! elle n’y croirait pas, tant que la preuve de leur mort ne lui serait pas matériellement fournie !

« Soit ! dit M. William Andrew. Je pense comme vous, mon cher