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à tout prix

qu’il s’agissait de retourner au Great-Eyry, et l’on n’ignore pas ce qu’elle pensait de cette antichambre de l’enfer. Toutefois, elle ne me fit aucune observation, et je préférai ne point la mettre dans la confidence, si certain que je fusse de sa discrétion.

En ce qui concerne les deux agents qui devaient m’accompagner, mon choix était fait d’avance. Tous deux appartenaient à la brigade d’informations, âgés l’un de trente, l’autre de trente-deux ans, ayant donné en maintes circonstances et sous mes ordres des preuves de vigueur, d’intelligence, d’audace ; l’un John Hart, de l’Illinois, l’autre, Nab Walker, du Massachusetts. Je n’aurais pu avoir la main plus heureuse.

Quelques jours s’écoulèrent. Aucune nouvelle ni de l’automobile, ni du bateau, ni du submersible. Si quelques indications parvinrent à l’Hôtel de la police, elles furent reconnues fausses, et il n’y eut pas lieu de leur donner suite. Quant aux racontars des journaux, ils n’avaient aucune valeur, et l’on sait bien que les feuilles même les mieux informées sont toujours sujettes à caution.

Cependant, par deux fois, il ne fut pas douteux que « l’homme du jour » s’était remontré, la première, sur une des routes de l’Arkansas aux environs de Little-Rock, la seconde, dans les parages méridionaux du lac Supérieur.

Or, chose absolument inexplicable, la première apparition s’était faite dans l’après-midi du 26 juin, la seconde dans la soirée du même jour. Comme, entre ces deux points du territoire, la distance n’est pas inférieure à huit cents milles, si, étant donné son invraisemblable vitesse, l’automobile pouvait couvrir ce trajet en peu de temps, encore aurait-on dû l’apercevoir, lorsqu’elle traversait l’Arkansas, le Missouri, l’Iowa, le Wisconsin.

En effet, ce n’était que par terre, non autrement, que le chauffeur aurait pu effectuer le voyage et, pourtant, son passage ne fut signalé nulle part.