Le Kaw-djer considéra plus attentivement ses interlocuteurs. De races différentes, ils avaient entre eux quelque chose de commun : cet air de famille des hommes d’action. Tous deux étaient jeunes, trente ans à peine. Ils avaient les épaules larges, le sang à fleur de peau. Leur front, que découvraient des cheveux taillés en brosse, dénotait l’intelligence, et leur menton saillant une énergie qui eût confiné à la dureté si le regard très droit de leurs yeux bleus ne l’avait adouci.
Pour la première fois, le Kaw-djer avait devant lui des chercheurs d’or sympathiques.
— Ah ! vous savez cela, dit-il. Vous ne faites qu’arriver, je crois, cependant.
— C’est-à-dire que nous revenons, expliqua Maurice Reynaud. L’année dernière, nous avons déjà passé quelques jours ici. Nous n’en sommes repartis qu’après avoir prospecté et reconnu l’emplacement que nous désirons exploiter.
— Ensemble ? demanda le Kaw-djer.
— Ensemble, répondit Alexander Smith.
Le Kaw-djer reprit, avec une expression de regret qui n’était pas feinte :
— Puisque vous êtes si bien renseignés, vous devez également savoir que je ne puis vous donner satisfaction, la loi que vous désirez respecter réservant toute concession aux citoyens hosteliens.
— Pour les claims, objecta Maurice Reynaud.
— Eh bien ? interrogea le Kaw-djer.
— Il s’agit d’une mine, expliqua Alexander Smith. La loi est muette sur ce point.
— En effet, reconnut le Kaw-djer, mais une mine est une lourde entreprise, qui exige d’importants capitaux…
— Nous les possédons, interrompit Alexander Smith. Nous ne sommes partis que pour nous les procurer.
— Et c’est chose faite, dit Maurice Reynaud. Nous représentons ici la Franco-English Gold Mining Company, dont mon camarade Smith est l’ingénieur en chef, et dont je suis le directeur, société constituée à Londres le 10 septembre dernier, au capital de quarante mille livres sterling, sur lesquelles moitié représentent notre apport, et vingt mille livres le working-capital. Si nous traitons, comme je n’en doute pas, le steamer qui nous