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« Tas de voleurs ! criait-il, en montrant le poing à Hartlepool.

— Parle toujours, mon garçon, répondit celui-ci, tout en continuant sa perquisition sans s’émouvoir autrement.

— Vous me le paierez ! menaça Kennedy que le sang-froid de son ancien chef exaspérait plus encore.

— Eh ! Eh ! il me semble que c’est toi qui paies, pour l’instant, railla impitoyablement Hartlepool.

— On se reverra !

— Quand tu voudras. Le plus tard possible à mon goût.

— Voleur !… cria Kennedy au paroxysme de la colère.

— Tu te trompes, répliqua Hartlepool d’un ton bonhomme, et la preuve en est que, sur tes cinquante-trois kilos d’or, je ne prends que treize kilos deux cent cinquante grammes exactement, soit le quart, plus la valeur des deux cents piastres que tu sais. Il va de soi que, pour ton argent…

— Misérable !…

— Tu as droit à une concession en règle.

— Brigand !…

— Tu n’as qu’à nous dire où est ton claim.

— Bandit !…

— Tu ne veux pas ?…

— Canaille !…

— À ton aise, mon garçon ! » conclut Hartlepool en mettant fin à cette scène.

Tout compte fait, les perquisitions rapportèrent au trésor près de trente-sept kilos d’or, représentant en monnaie française une valeur d’environ cent vingt-deux mille francs. En échange, des concessions régulières furent délivrées. Seul Kennedy n’eut même pas cet avantage, en raison de son obstination à ne pas désigner l’emplacement du claim où il avait fait une si belle récolte.

La somme ainsi recueillie fut placée dans la caisse de l’État. Quand, au printemps, les relations seraient reprises avec le reste du monde, on l’échangerait contre des espèces ayant cours. En attendant, le Kaw-djer, ayant largement publié le résultat des perquisitions, créa pour une somme égale du papier-monnaie auquel on accorda toute confiance, ce qui lui permit de soulager bien des misères.

L’hiver s’écoula vaille que vaille, et l’on atteignit le printemps. Aussitôt, les mêmes causes produisirent les mêmes