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XII

l’île au pillage.

Tel fut le premier acte du drame de l’or, qui devait, comme une pièce bien charpentée, en comporter trois, correctement séparés par les entractes des hivers.

Les déplorables événements qui avaient constitué la trame de ce premier acte eurent forcément une immédiate répercussion sur la vie jusque-là heureuse des Hosteliens. Un petit nombre d’entre eux avaient disparu. Qu’étaient-ils devenus ? On l’ignorait, mais tout portait à croire qu’ils avaient été victimes de quelque rixe ou de quelque accident. Plusieurs familles étaient donc en deuil d’un père, d’un fils, d’un frère ou d’un mari.

D’autre part, le bien-être jadis si universellement répandu sur l’île Hoste était grandement diminué. Rien ne manquait encore, à vrai dire, de ce qui est essentiel ou seulement utile à la vie, mais tout avait atteint des prix triples et quadruples de ceux pratiqués antérieurement.

Les pauvres eurent à souffrir de cet état de choses. Les efforts du Kaw-djer, qui s’ingéniait à leur procurer du travail, n’obtenaient que peu de succès. L’arrêt presque complet des transactions particulières incitait tout le monde à la prudence, et personne n’osait rien entreprendre. Quant aux travaux exécutés pour le compte de l’État, celui-ci, dont les caisses étaient vides, ne pouvait plus les continuer. Ironique conséquence de la découverte des mines, l’État manquait d’or depuis qu’on en trouvait dans le sol en abondance.

Où s’en serait-il procuré ? Si quelques rares Hosteliens s’étaient résignés à payer leur concession, pas un n’avait versé, sur son extraction, la redevance fixée par la loi, et la misère