Page:Verne - Les Naufragés du Jonathan, Hetzel, 1909.djvu/448

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À partir de ce jour, les arrivées se succédèrent à intervalles rapprochés. Aussitôt débarqués, les chercheurs d’or, en gens ayant l’habitude des formalités à remplir, se rendaient directement au gouvernement et s’enquéraient des prescriptions légales en vigueur. Ils s’accordaient unanimement à les trouver exorbitantes. Remettant alors à régulariser leur situation, ils se répandaient par la ville. Le petit nombre de ses habitants et les informations qu’ils recueillaient habilement avaient tôt fait de les convaincre de la faiblesse de l’Administration hostelienne. C’est pourquoi ils se décidaient tous à passer outre à des lois que bravaient impunément les Hosteliens eux-mêmes, et, après avoir erré un ou deux jours dans les rues désertes de Libéria, ils quittaient la ville et s’éloignaient sans autre formalité à la recherche d’un claim.

Mais l’hiver vint, et, au même instant que les travaux miniers étaient arrêtés, le flot des arrivants fut tari. Le 24 mars, le dernier navire s’éloigna du Bourg-Neuf, où il avait débarqué son contingent de prospecteurs. Plus de deux mille aventuriers foulaient à ce moment le sol de l’île.

Ce navire emportait, à de nombreux exemplaires, un décret notifié par le gouvernement de l’île Hoste à tous les États du globe. Le Kaw-djer, qui avait assisté à l’invasion avec une douleur grandissante, faisait savoir urbi et orbi que, l’île Hoste ayant une population surabondante, il serait mis obstacle, fût-ce par la force, au débarquement de tout nouvel étranger.

Cette mesure serait-elle efficace ? L’avenir le dirait, mais, en son for intérieur, le Kaw-djer en doutait. Trop puissante est l’attirance de l’or sur certaines natures pour que rien ait le pouvoir de les arrêter.

D’ailleurs, le mal était fait déjà. La révolte des Hosteliens qui rejetaient toute discipline, l’inévitable misère à laquelle ils étaient condamnés, l’invasion de cette tourbe d’aventuriers, de ces gens de sac et de corde apportant avec eux tous les vices de la terre, c’était un désastre.

À cela, que pouvait-on ? Rien. On ne pouvait que temporiser et attendre des jours meilleurs, s’il en devait jamais naître. Halg, Karroly, Hartlepool, Harry et Edward Rhodes, Dick, Germain Rivière et une trentaine d’autres étaient seuls contre