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LES FRÈRES KIP

faiblissait pas ; mais que de chagrin il éprouvait à constater son impuissance !

Malgré les réconfortantes paroles de M. Hawkins, Karl Kip, lui aussi, se laissait aller parfois à un complet découragement contre lequel son frère ne réagissait pas sans peine. Qui sait même s’il ne reprochait pas à Pieter d’avoir voulu revenir d’Amérique en Tasmanie pour se représenter devant cette justice qui les avait condamnés une première fois ?…

« Et qui nous condamnera peut-être une seconde !… dit un jour Karl Kip.

— Non…, frère, non… ! s’écria Pieter. Dieu ne le permettrait pas…

— Il a bien permis qu’on nous ait condamnés à mort comme assassins et que notre nom soit voué à l’infamie !

— Aie confiance, pauvre frère, aie confiance ! »

Pieter Kip ne pouvait répondre autre chose. D’ailleurs, cette confiance, rien ne l’eût ébranlée en lui… Elle était aussi absolue que la conviction de M. Hawkins en leur innocence !

À cette époque, M. Zieger, dont le séjour à Hobart-Town ne devait pas se prolonger au-delà d’une quinzaine, s’occupait de trouver un embarquement sur un steamer allemand ou anglais à destination de Port-Praslin.

Ces quelques semaines, les deux familles venaient de les passer ensemble dans la plus complète intimité. Depuis le retour des frères Kip, elles partageaient les mêmes idées, les mêmes espérances. Quant à Mme  Gibson, la pensée que deux innocents eussent été victimes d’une erreur la troublait profondément, et elle souffrait à voir se prolonger cette situation.

En effet, l’affaire restait toujours au même point en ce qui concernait la demande de révision. De nouvelles informations prises en Hollande, relativement aux frères Kip, n’avaient fait que