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INCIDENTS.

Au surplus, Flig Balt et ses complices ne tardèrent pas à être servis par les circonstances.

Dans la soirée du 17, le temps changea. Le soleil venait de se coucher sur un horizon chargé de nuages lourds. La mer, qui sentait quelque chose, devenait houleuse. Toute la journée, la chaleur avait été accablante. À plusieurs reprises, la brise ayant refusé, les voiles battirent sur les mâts.

Vers trois heures de l’après-midi, le thermomètre Fahrenheit avait accusé cent trois degrés à l’ombre[1] et, vers cinq heures, le baromètre était tombé à vingt-sept pouces[2]. Ce rapide abaissement de la colonne mercurielle indiquait un profond trouble atmosphérique.

Du reste, la houle très mouvementée, quelques lames qui déferlaient déjà, annonçaient que le vent faisait rage dans l’ouest.

Ce trouble atmosphérique fut précédé d’un violent orage. Vers neuf heures, après de lointains roulements de foudre, l’horizon s’embrasa d’éclairs si ardents, si multipliés, que la mer, en les réverbérant, paraissait rouler des vagues de feu. Quand ils ne se déchargeaient pas à sa surface, ils s’échangeaient d’un nuage à l’autre sans discontinuité. Les éclats du tonnerre devinrent tels que l’oreille en était assourdie, comme les yeux étaient éblouis par les fulgurantes décharges électriques.

Vers onze heures, l’orage atteignit sa plus haute intensité. La foudre atteignit plusieurs fois l’extrémité de la mâture, sans causer de dommage, et s’écoula par les fils des paratonnerres. On pouvait être assuré maintenant que cet orage serait suivi d’un coup de vent d’une grande violence, et il fallait être prêt à le recevoir.

  1. 39° 44 centigrades.
  2. 730 millimètres.