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LES FRÈRES KIP

matinée, la navigation du James-Cook serait assurément favorisée. Il se trouverait alors en pleine zone des alizés du sud-est, qui règnent de mai à novembre et auxquels succède la mousson pendant les autres mois de l’année,

M. Gibson était donc prêt à hisser ses hautes voiles dès que la brise les pourrait remplir. Ce ne serait pas trop tôt s’éloigner de cette dangereuse région de la Papouasie et de la Louisiade. Appuyé d’un bon vent, tout dessus et grand largue, ce n’étaient pas les pirogues à pagaies ou à balancier qui parviendraient à rejoindre le James-Cook, si les indigènes prétendaient renouveler leur attaque.

Du reste, ils ne reparurent pas. Aussi les armes, fusils et revolvers, furent-elles rentrées dans le rouf. On retira la petite pièce du sabord d’avant. Le brick n’aurait plus à se tenir sur la défensive.

Et, à ce propos, M. Gibson fit allusion à la balle maladroite qui l’avait effleuré la veille, au moment où Karl Kip repoussait le capitan et le précipitait à la mer.

« Comment !… s’écria M. Hawkins, très étonné, tu as failli…

— Être atteint… mon ami, et il ne s’en est pas fallu d’un demi-pouce que je n’eusse la tête traversée.

— Nous l’ignorions, déclara Pieter Kip, Mais êtes-vous sûr que ce soit un coup de feu ?… N’est-ce pas plutôt une javeline ou une zagaie que vous aurait lancée un de ces sauvages ?…

— Non, répondit Nat Gibson, Voici le chapeau de mon père, et vous voyez qu’il a été percé d’une balle. »

il n’y eut aucun doute après l’examen du chapeau. En somme, il n’était pas surprenant que, pendant la lutte, au milieu de cette profonde obscurité, un des revolvers eut été mal dirigé, et l’on n’y pensa plus.

Vers sept heures et demie, la brise avait acquis assez de force