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LA MER DE CORAIL.

ceux qui, comme le James-Cook, font le grand cabotage entre l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les archipels du nord. Il est donc rare que quelque voile se montre à l’horizon. De là une navigation monotone à laquelle doivent se résigner sinon les équipages, peu soucieux de distraction, du moins les passagers auxquels ces traversées semblent interminables.

Dans l’après-midi du 9 novembre, Nat Gibson, penché sur la lisse à l’avant, appela le capitaine, qui venait de quitter le rouf, et il lui indiqua une sorte de masse noirâtre à deux milles par bâbord.

« Père, dit-il, est-ce que ce serait un écueil ?…

— Je ne le pense pas, répondit M. Gibson. J’ai fait une bonne observation à midi, je suis sûr de ma position…

— Aucun récif n’est porté sur la carte ?…

— Aucun, Nat.

— Il y a cependant là quelque chose… »

Après avoir observé cette masse avec la longue-vue, le capitaine répondit ;

« Je ne me rends pas bien compte… »

Les deux frères venaient d’arriver ainsi que M. Hawkins. Ils regardèrent attentivement cette masse de forme irrégulière, qu’il eût été possible de prendre pour une roche coralligène.

« Non, dit Karl Kip, après s’être servi de la longue-vue, ce n’est point un écueil…

— Il semble même que cela flotte et s’élève à la lame », dit M. Hawkins.

Et, en effet, l’objet en question n’était pas immobile à la surface de la mer, et obéissait aux mouvements de la houle.

« Et, de plus, dit Karl Kip, on n’aperçoit aucun ressac sur ses bords.

— On dirait même qu’il dérive ! » fit remarquer Nat Gibson.