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EN VUE DE L’ÎLE NORFOLK.

C’est pourtant, en ses dimensions restreintes, une riche parcelle du domaine colonial de la Grande-Bretagne. Lorsque Cook la découvrit en 1774, il fut tout d’abord frappé de son admirable végétation sous ce climat à la fois doux et chaud des tropiques. On eût dit une corbeille détachée des campagnes de la Nouvelle-Zélande, ornée de plantes identiques. Là se multiplie un lin de qualité supérieure, le « phormium tenax », et une sorte de pin de toute beauté appartenant au genre des araucarias. Puis, à perte de vue s’étendent des plaines verdoyantes où poussent sans culture l’oseille sauvage et le fenouil. Déjà, au commencement du siècle, le gouvernement britannique avait transporté dans l’île une colonie de convicts. Grâce au travail de ces malheureux, des défrichements s’effectuèrent, des travaux agricoles furent entrepris et le rendement du maïs devint tel que les boisseaux s’y comptèrent par milliers. Il y avait là comme un grenier d’abondance, placé entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Mais trop de récifs et de brisants en occupent les approches, empêchant d’y puiser dans des conditions pratiques.

Aussi l’établissement pénitentiaire, en présence de ces obstacles, dut être une première fois abandonné. Il est vrai que, sur cette île, on pouvait si aisément tenir sous un joug de fer les plus endurcis criminels de la Tasmanie et de la Nouvelle-Galles, que la colonie pénale fut réorganisée. Elle compta jusqu’à cinq cents convicts surveillés par cent vingt-quatre militaires, et une administration de cent cinquante employés. Une ferme publique y fut créée, mise en valeur, et la récolte du maïs assura la consommation en céréales.

Du reste, l’ile Norfolk était inhabitée à l’époque où le grand navigateur en détermina la situation géographique. Aucun indigène, maori ou malais, n’y avait été attiré malgré les richesses du sol. Elle n’eut jamais d’autre population que ces condamnés introduits