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du capitaine grant.

sur le haut Waikato, à l’extrémité d’une chaîne de collines escarpées, et couverte par trois lignes de défense. Des prophètes appelaient toute la population maorie à la défense du sol et promettaient l’extermination des « pakekas », c’est-à-dire des blancs. Trois mille hommes se disposaient à la lutte sous les ordres du général Cameron, et ne faisaient plus aucun quartier aux Maoris, depuis le meurtre barbare du capitaine Sprent. De sanglantes batailles eurent lieu. Quelques-unes durèrent douze heures, sans que les Maoris cédassent aux canons européens. C’était la farouche tribu des Waikatos, sous les ordres de William Thompson, qui formait le noyau de l’armée indépendante. Ce général indigène commanda d’abord à deux mille cinq cents guerriers, puis à huit mille. Les sujets de Shongi et de Heki, deux redoutables chefs, lui vinrent en aide. Les femmes dans cette guerre sainte prirent part aux plus rudes fatigues. Mais le bon droit n’a pas toujours les bonnes armes. Après des combats meurtriers, le général Cameron parvint à soumettre le district du Waikato, un district vide et dépeuplé, car les Maoris lui échappèrent de toutes parts. Il y eut d’admirables faits de guerre. Quatre cents Maoris enfermés dans la forteresse d’Orakan, assiégés par mille Anglais sous les ordres du brigadier général Carey, sans vivres, sans eau, refusèrent de se rendre. Puis, un jour, en plein midi, ils se frayèrent un chemin à travers le 40e régiment décimé, et se sauvèrent dans les marais.

— Mais la soumission du district de Waikato, demanda John Mangles, a-t-elle terminé cette sanglante guerre ?

— Non, mon ami, répondit Paganel. Les Anglais ont résolu de marcher sur la province de Taranaki et d’assiéger Mataitawa, la forteresse de William Thompson. Mais ils ne s’en empareront pas sans des pertes considérables. Au moment de quitter Paris, j’avais appris que le gouverneur et le général venaient d’accepter la soumission des tribus Taranga, et qu’ils leur laissaient les trois quarts de leurs terres. On disait aussi que le principal chef de la rébellion, William Thompson, songeait à se rendre ; mais les journaux australiens n’ont point confirmé cette nouvelle ; au contraire. Il est donc probable qu’en ce moment même la résistance s’organise avec une nouvelle vigueur.

— Et suivant votre opinion, Paganel, dit Glenarvan, cette lutte aurait pour théâtre les provinces de Taranaki et d’Auckland ?

— Je le pense.

— Cette province même où nous a jetés le naufrage du Macquarie ?

— Précisément. Nous avons pris terre à quelques milles au-dessus du havre Kawhia, où doit flotter encore le pavillon national des Maoris.

— Alors, nous ferons sagement de remonter vers le nord, dit Glenarvan.