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Il fallut renoncer à l’espoir de sauver le Duncan. Cinq jours s’étaient écoulés depuis le départ de Ben Joyce. Le yacht devait être en ce moment à la côte et aux mains des convicts !

Cependant, il était impossible que cet état de choses se prolongeât. Les crues temporaires s’épuisent vite, et en raison même de leur violence. En effet, Paganel, dans la matinée du 21, constata que l’élévation des eaux, au-dessus de l’étiage, commençait à diminuer. Il rapporta à Glenarvan le résultat de ses observations.

« Eh ! qu’importe, maintenant ? répondit Glenarvan, il est trop tard !

— Ce n’est pas une raison pour prolonger notre séjour au campement, répliqua le major.

— En effet, répondit John Mangles. Demain, peut-être, le passage sera praticable.

— Et cela sauvera-t-il mon malheureux équipage ? s’écria Glenarvan.

— Que Votre Honneur m’écoute, reprit John Mangles. Je connais Tom Austin. Il a dû exécuter vos ordres et partir dès que son départ a été possible. Mais qui nous dit que le Duncan fût prêt, que ses avaries fussent réparées à l’arrivée de Ben Joyce à Melbourne ? Et si le yacht n’a pu prendre la mer, s’il a subi un jour, deux jours de retard !

— Tu as raison, John ! répondit Glenarvan. Il faut gagner la baie Twofold. Nous ne sommes qu’à trente-cinq milles de Delegete !

— Oui, dit Paganel, et dans cette ville nous trouverons de rapides moyens de transport. Qui sait si nous n’arriverons pas à temps pour prévenir un malheur ?

— Partons ! » s’écria Glenarvan.

Aussitôt, John Mangles et Wilson s’occupèrent de construire une embarcation de grande dimension. L’expérience avait prouvé que des morceaux d’écorce ne pourraient résister à la violence du torrent. John abattit des troncs de gommiers dont il fit un radeau grossier, mais solide. Ce travail fut long, et la journée s’écoula sans que l’appareil fût terminé. Il ne fut achevé que le lendemain.

Alors, les eaux de la Snowy avaient sensiblement baissé. Le torrent redevenait rivière, à courant rapide, il est vrai. Cependant, en biaisant, en le maîtrisant dans une certaine limite, John espérait atteindre la rive opposée.

À midi et demi, on embarqua ce que chacun pouvait emporter de vivres pour un trajet de deux jours. Le reste fut abandonné avec le chariot et la tente. Mulrady allait assez bien pour être transporté ; sa convalescence marchait rapidement.

À une heure, chacun prit place sur le radeau, que son amarre retenait