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pas, le comprenait du moins. Il faut croire que le Patagon lui donna d’excellentes raisons, car, après avoir pendant quelque temps « discuté, » Thaouka se rendit à ses arguments et obéit, non sans ronger son frein.

Mais si Thaouka comprit Thalcave, Thalcave n’avait pas moins compris Thaouka. L’intelligent animal, servi par des organes supérieurs, sentait quelque humidité dans l’air ; il l’aspirait avec frénésie, agitant et faisant claquer sa langue, comme si elle eût trempé dans un bienfaisant liquide. Le Patagon ne pouvait s’y méprendre : l’eau n’était pas loin.

Il encouragea donc ses compagnons en interprétant les impatiences de Thaouka, que les deux autres chevaux ne tardèrent pas à comprendre. Ils firent un dernier effort, et galopèrent à la suite de l’Indien.

Vers trois heures, une ligne blanche apparut dans un pli de terrain. Elle tremblotait sous les rayons du soleil.

« L’eau ! dit Glenarvan.

— L’eau ! oui, l’eau ! » s’écria Robert.

Ils n’avaient plus besoin d’exciter leurs montures ; les pauvres bêtes, sentant leurs forces ranimées, s’emportèrent avec une irrésistible violence. En quelques minutes, elles eurent atteint le rio de Guamini, et, toutes harnachées, se précipitèrent jusqu’au poitrail dans ses eaux bienfaisantes.



Leurs maîtres les imitèrent, un peu malgré eux, et prirent un bain involontaire, dont ils ne songèrent pas à se plaindre.

« Ah ! que c’est bon ! disait Robert, se désaltérant en plein rio.

— Modère-toi, mon garçon, » répondait Glenarvan, qui ne prêchait pas d’exemple.

On n’entendait plus que le bruit de rapides lampées.

Pour son compte, Thalcave but tranquillement, sans se presser, à petites