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EXPLICATION À COUPS DE FUSIL

Marcel, de son côté, déployait une vigueur et une souplesse remarquables.

La lutte eût nécessairement fini par la mort de l’un des combattants, si l’intervention d’Octave ne fût arrivée à point pour amener un résultat moins tragique. Sigimer, pris par les deux bras et désarmé, se vit attaché de manière à ne pouvoir plus faire un mouvement.

« Et l’autre ? » demanda Octave.

Marcel montra au bout de l’appartement un sofa sur lequel Arminius était étendu tout sanglant.

« Est-ce qu’il a reçu une balle ? demanda Octave.

— Oui, » répondit Marcel.

Puis il s’approcha d’Arminius.

« Mort ! dit-il.

— Ma foi, le coquin ne l’a pas volé ! s’écria Octave.

— Nous voilà maîtres de la place ! répondit Marcel. Nous allons procéder à une visite sérieuse. D’abord le cabinet de Herr Schultze ! »

Du salon d’attente où venait de se passer le dernier acte du siège, les deux jeunes gens suivirent l’enfilade d’appartements qui conduisait au sanctuaire du Roi de l’Acier.

Octave était en admiration devant toutes ces splendeurs.

Marcel souriait en le regardant et ouvrait une à une les portes qu’il rencontrait devant lui jusqu’au salon vert et or.

Il s’attendait bien à y trouver du nouveau, mais rien d’aussi singulier que le spectacle qui s’offrit à ses yeux. On eut dit que le bureau central des postes de New-York ou de Paris, subitement dévalisé, avait été jeté pêle-mêle dans ce salon. Ce n’étaient de tous côtés que lettres et paquets cachetés, sur le bureau, sur les meubles, sur le tapis. On enfonçait jusqu’à mi-jambe dans cette inondation. Toute la correspondance financière, industrielle et personnelle de Herr Schultze, accumulée de jour en jour dans la boîte extérieure du parc, et fidèlement relevée par Arminius et Sigimer, était là dans le cabinet du maître.

Que de questions, de souffrances, d’attentes anxieuses, de misères, de larmes enfermées dans ces plis muets à l’adresse de Herr Schultze ! Que de millions aussi, sans doute, en papier, en chèques, en mandats, en ordres de tout genre !… Tout cela dormait là, immobilisé par l’absence de la seule main qui eut le droit de faire sauter ces enveloppes fragiles mais inviolables.

« Il s’agit maintenant, dit Marcel, de retrouver la porte secrète du laboratoire ! »