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une leçon de boxe.

derrière et tomba comme une masse à la renverse. Patrick eut un petit rire mezza voce, et, sans bouger, se tint prêt à soutenir une nouvelle attaque.

Elle ne se fit pas attendre. À peine tombé, l’ours s’était relevé le museau en sang. Ivre de rage, il se lança à corps perdu sur son ennemi.

Patrick ne perdit rien de son sang-froid. Le moment favorable choisi avec un tact parfait, ses deux poings, cette fois, partirent à la volée. Le gauche, d’abord, atteignit et creva l’un des yeux de l’animal, puis le droit revint s’écraser contre le museau avec une telle violence que le sang gicla et que l’on entendit le bruit sec des crocs brisés.

De nouveau, l’ours tomba à la renverse et, de nouveau, Patrick attendit généreusement qu’il se fût remis debout avant de reprendre le jeu. On n’eût pas agi avec plus de loyauté dans une séance de lutte romaine.

L’ours, d’ailleurs, se relevait moins rapidement que lors de sa première chute. Il se redressa enfin, mais pour se reposer lourdement sur son arrière-train. Il ne bougeait plus. Il ne rugissait plus. D’un air désorienté, il frottait de la patte son œil crevé, tandis que sa langue épaisse passait et repassait sur ses babines ensanglantées.

Lassé d’attendre, Patrick, le poing en arrêt, fit en avant un pas que l’ours fit immédiatement en arrière. L’Irlandais aussitôt avança d’un second pas, puis d’un troisième, tandis que l’ours reculait d’autant. Pendant trois minutes, cette singulière poursuite continua, au grand ébahissement des spectateurs.

Patrick, impatienté, brusqua les choses. Désespérant d’atteindre l’ennemi dans sa retraite, et comprenant la nécessité d’une arme de jet, il se baissa pour ramasser une grosse pierre dont l’envoi, à titre d’insultante provocation, ferait, sans doute, renaître la bataille.

Il n’en fut rien. En voyant le mouvement de l’Irlandais, l’ours