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plit la tasse d’eau fraîche, il essaya de lui en verser quelques gouttes dans la bouche sans y parvenir. Les mâchoires, aux dents d’une blancheur éclatante, ne se desserrèrent pas. Llanga, mouillant alors un peu d’herbe sèche, bassina délicatement les lèvres du petit et cela parut lui faire du bien. Sa main pressa faiblement celle qui la tenait, et le mot « ngora » fut encore prononcé.

Et, qu’on ne l’oublie pas, ce mot, d’origine congolaise, les indigènes l’emploient pour désigner la mère… Est-ce donc que ce petit être appelait la sienne ?…

La sympathie de Llanga se doublait d’une pitié bien naturelle, à la pensée que ce mot allait peut-être se perdre dans un dernier soupir !… Un singe ?… avait dit Max Huber. Non ! ce n’était pas un singe !… Voilà ce que Llanga, dans son insuffisance intellectuelle, n’aurait pu s’expliquer.

Il demeura ainsi pendant une heure, tantôt caressant la main de son protégé, tantôt lui imbibant les lèvres, et il ne le quitta qu’au moment où le sommeil l’eut assoupi de nouveau.

Alors, Llanga, se décidant à tout dire, vint rejoindre ses amis, tandis que le radeau, repoussé de la berge, retombait dans le courant.

« Eh bien, redemanda Max Huber en souriant, comment va ton singe ?… »