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le testament d’un excentrique.

du cornet de maître Tornbrock, à huit heures sonnant, le 24 juin, dans la salle de l’Auditorium. Les milliers de spectateurs, qui assistaient à ce tirage, — avec la pensée qu’il pourrait être le dernier du match Hypperbone, — le proclamèrent dans tous les quartiers de la cité chicagoise, et des milliers de télégrammes le répandirent aux quatre coins de l’Ancien et du Nouveau-Monde.

C’était donc l’homme masqué, le partenaire de la dernière heure, l’intrus du codicille, en un mot ou plutôt en trois lettres, cet X K Z, qui gagnait la partie, et, avec la partie, les soixante millions de dollars !

Et n’y avait-il pas lieu d’observer comment s’était accomplie la marche de ce favori de la fortune ?… Tandis que tant de malheurs frappaient ses six concurrents, celui-ci confiné dans l’hôtellerie, celui-là obligé d’acquitter le péage au pont du Niagara, l’un perdu dans le labyrinthe, l’autre précipité au fond du puits, trois d’entre eux condamnés à la prison, tous ayant eu des primes à payer, X K Z avait toujours marché d’un pas sûr, allant de l’Illinois au Wisconsin, du Wisconsin au District de Columbia, du District de Columbia au Minnesota, et du Minnesota au but, sans avoir eu à débourser une seule prime, et dans un rayon restreint, d’où économie de fatigues et de dépenses au cours de ses faciles voyages !

Cela ne témoignait-il pas d’une chance peu ordinaire, et même merveilleuse, pourrait-on dire, la veine de ces privilégiés à qui tout réussit dans l’existence ?…

Restait à savoir qui était cet X K Z, et il ne tarderait pas à se faire connaître, sans doute, ne fût-ce que pour entrer en possession de l’énorme héritage.

Assurément, aux époques indiquées pour ses tirages, lorsqu’il s’était présenté aux Post Offices de Milwaukee du Wisconsin, de Washington du District de Columbia, de Minneapolis du Minnesota, les curieux étaient accourus en foule ; mais ils n’avaient aperçu tantôt qu’un homme d’âge moyen, tantôt un homme ayant dépassé la soixantaine, lequel avait aussitôt disparu, sans qu’il eût été possible de retrouver ses traces.