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la prison du missouri.

— Non !… Et pourquoi ?…

— Je trouve convenable d’attendre ici M. Max Réal… Nous devons bien cela à cet infortuné jeune homme ! »

Et Jovita Foley d’acquiescer à cette proposition, mais à la condition que le prisonnier ne tarderait pas plus de trois jours à franchir le seuil de sa prison.

Or, ce fut précisément dès le lendemain, 13, que Max Réal descendit à la gare de Saint-Louis. Et il existait sans doute un mystérieux lien de suggestion entre le premier et la cinquième partenaire, puisque, si celle-ci désirait ne pas partir avant que celui-là fût arrivé, celui-là voulait arriver avant que celle-ci fût partie.

Pauvre Mme Réal ! En quel état devait être cette excellente mère, à la pensée que son fils était si malencontreusement arrêté sur le chemin du succès !

Il va de soi que Max Réal savait par les journaux que Lissy Wag logeait à Lincoln Hotel. Dès qu’il s’y présenta, il fut reçu par les deux amies, tandis que Tommy attendait dans un hôtel voisin le retour de son maître.

Lissy Wag, émue plus qu’elle n’aurait voulu le paraître, s’avança au-devant du jeune peintre :

« Ah ! monsieur Réal, dit-elle, que nous vous plaignons…

— Et du fond du cœur !… ajouta Jovita Foley, qui ne le plaignait pas le moins du monde, et dont les yeux ne parvenaient pas à exprimer la pitié.

— Mais non… miss Wag… répondit Max Réal, lorsqu’il eut repris haleine après une montée trop rapide, non !… je ne suis pas à plaindre… ou du moins, je ne veux pas l’être, puisque j’ai le bonheur de vous délivrer…

— Et que vous avez raison !… déclara Jovita Foley, qui ne put retenir cette réponse aussi franche que désagréable.

— Excusez Jovita, dit alors Lissy Wag. Elle ne réfléchit pas assez, monsieur Réal, et, pour moi, croyez que j’éprouve un profond chagrin…