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TERRIBLES INQUIÉTUDES.

une cire, après cet accès qui avait élevé à quarante degrés la température de son corps, eut la force de sourire.

« Je me sens mieux déjà, dit-elle, et pourtant… je n’ai encore rien pris…

— Jeanne… ma chère Jeanne !… » murmura Jacques Helloch en s’agenouillant.

Quelques minutes suffirent à Germain Paterne pour obtenir une infusion de cette écorce du coloradito, et Jacques Helloch approcha la tasse des lèvres de la jeune fille.

Dès qu’elle en eut vidé le contenu :

« Merci ! » dit-elle, et ses yeux se refermèrent.

Il fallait maintenant la laisser seule. Aussi Germain Paterne entraîna-t-il Jacques, qui refusait de s’éloigner. Tous deux s’assirent à l’avant de la pirogue, où ils restèrent silencieux.

Les hommes avaient reçu ordre de débarquer, afin qu’il ne se produisît aucun bruit à bord. Si Jeanne s’endormait, il importait que rien ne troublât son sommeil.

Le sergent Martial avait été prévenu. Il savait que l’on s’était procuré le fébrifuge, il savait que celui-ci venait d’être administré à Jeanne. Aussi, quittant la Moriche, il sauta sur la berge, il courut vers la Gallinetta

Germain Paterne lui fit signe de s’arrêter…

Le pauvre homme obéit, et, les yeux en pleurs, s’appuya contre une roche.

D’après l’opinion de Germain Paterne, si un nouvel accès ne se déclarait pas, c’est que l’absorption de coloradito aurait produit son effet. Avant deux heures, cela serait décidé. Avant deux heures, on saurait s’il y avait espoir, peut-être même certitude de sauver la jeune fille.

En quelles inexprimables transes tous attendirent ! On écoutait si quelque soupir s’échappait des lèvres de Jeanne… si elle appelait… Non !… elle ne prononçait pas une parole…

Jacques Helloch se rapprocha du rouf…