Page:Verne - Le Superbe Orénoque, Hetzel, 1898.djvu/333

Cette page a été validée par deux contributeurs.
299
TERRIBLES INQUIÉTUDES.

où les cerros Moras accidentent la rive droite de leurs premières ramifications.

L’après-midi, une nouvelle crise d’une violence extraordinaire menaça d’emporter la malade. On crut sa dernière heure arrivée. Et tel fut le désespoir du sergent Martial, que Germain Paterne, afin que Jeanne ne pût entendre ses cris, dut le faire embarquer sur la Moriche qui suivait à une centaine de pieds en arrière. Le sulfate de quinine ne produisait plus aucun effet.

« Germain… Germain… dit alors Jacques Helloch, qui avait entraîné son compagnon à l’avant de la Gallinetta, Jeanne va mourir…

— Ne te désespère pas, Jacques !…

— Je te dis qu’elle va mourir !… Si cet accès ne la tue pas, elle n’en pourra supporter un autre… »

Ce n’était que trop certain, et Germain Paterne baissa la tête.

« Et ne rien pouvoir… rien ! » soupirait-il.

Vers trois heures de l’après-midi, tomba une pluie torrentielle, qui rafraîchit un peu l’atmosphère dévorante, presque constamment orageuse. Il n’y eut pas lieu de s’en plaindre, car le fleuve profitait de cette eau abondamment versée des nuages blafards, amassés en couches profondes. Ses tributaires de droite et de gauche, si multipliés en cette portion de son cours, relevaient son étiage et assuraient le passage des pirogues.

À quatre heures, le cerro Yaname, dont l’altitude est considérable, apparut à gauche, au détour d’un massif boisé. Au-delà du brusque coude que dessine l’Orénoque en cet endroit, s’ouvrait l’étroite embouchure du rio Mavaca.

La brise étant entièrement tombée, Valdez et Parchal vinrent prendre leur poste au pied d’un sitio, composé de quelques paillotes, où vivaient cinq ou six familles mariquitares.

Le premier qui sauta sur la berge fut Jacques Helloch, après avoir dit au patron de la Moriche :

« Venez, Parchal. »

Où allait-il ?…