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BŒUFS ET GYMNOTES.

la rencontre de ces Quivas, car, à ce que l’on disait dans le pays, ils cherchaient à regagner les territoires de la Colombie, d’où ils avaient été chassés, et, si cela est, ils ne peuvent être de ce côté de l’Orénoque ! »

Jorrès était-il bien informé, quand il disait que ces Quivas devaient se diriger vers les llanos de la Colombie en passant plus au nord, c’était possible. Quoi qu’il en soit, les voyageurs n’oublieraient pas les recommandations de M. Manuel Assomption et se tiendraient sur leurs gardes.

La journée s’écoula, sans avoir été marquée par aucun incident. La navigation s’accomplissait dans les meilleures conditions de vitesse. Les pirogues allaient d’îles en îles, ne quittant l’une que pour atteindre l’autre.

Le soir, elles vinrent prendre leur poste à la pointe de l’île Caricha.

Le vent ayant calmi, mieux valait stationner que de recourir aux palancas pendant l’obscurité.

Dans une excursion sur la lisière de l’île, Jacques Helloch et le sergent Martial abattirent un de ces paresseux juché entre les branches d’un cecropia, dont les feuilles fournissent à cet animal son habituelle nourriture. Puis, en revenant, à l’embouchure du rio Caricha, au moment où un couple de ces sarigues, qui appartiennent à la famille des chironectes, s’occupait à pêcher pour son compte, les chasseurs firent un coup double, qui fut plus adroit qu’opportun. En effet, à se repaître de poissons, ces sarigues ne donnent qu’une chair coriace et huileuse, dont les Indiens ne veulent pas. Elles ne peuvent donc remplacer ces singes, lesquels sont un véritable régal, — même pour des estomacs européens.

Il est vrai, ces chironectes reçurent bon accueil de Germain Paterne, qui s’occupa, avec l’aide de Parchal, de les préparer pour en conserver la peau.

Quant au paresseux, uniquement fructivore, on le mit à l’étuve dans un trou rempli de pierres brûlantes, où il devait rester toute