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LE SUPERBE ORÉNOQUE.

« Et pourtant, dit M. Mirabal, ma mémoire ne me rappelle rien… non… rien… bien qu’à cette époque je fusse certainement à San-Fernando…

— Comment, s’écria le jeune garçon, mon père a passé ici… il a dû y séjourner quelque temps… et il n’aurait pas laissé trace de son passage !… »

Et des sanglots lui échappèrent, comme si son dernier espoir se fût évanoui devant les affirmations si précises, si désolantes de M. Mirabal.

« Ne vous désespérez pas… Jean, — cette fois, il ne dit pas : mon cher Jean ! — reprit Jacques Helloch, incapable, lui aussi, de maîtriser son émotion. Assurément le colonel de Kermor a pu venir à San-Fernando sans que M. Mirabal en ait été informé… »

Le vieillard releva la tête.

« D’autres personnes l’ont peut-être connu… continua Jacques Helloch… Nous chercherons… nous interrogerons… Je vous le répète… Jean… il ne faut pas renoncer… »

Le sergent Martial se taisait… Il regardait le jeune garçon… Il semblait lui redire ce qu’il lui avait maintes fois répété avant leur départ : « Tu verras, mon pauvre enfant, que nous ne ferons qu’un inutile voyage ! »

« Enfin, ajouta M. Mirabal pour conclure, comme il serait possible, après tout, que je n’eusse rien su de la présence du colonel de Kermor, je ferai des recherches… je m’informerai près des habitants de San-Fernando… Moi aussi, je vous l’assure, il ne faut pas désespérer… Que votre père soit venu à San-Fernando, ce n’est pas douteux… Mais voyageait-il sous son nom ?… Avait-il conservé en voyage sa qualité de colonel ? »

Oui ! il y avait encore cette hypothèse, admissible en somme, bien qu’on ne se fût pas trop expliqué pourquoi le colonel aurait caché son nom et sa qualité.

« À moins, fit observer Jacques Helloch, que M. de Kermor ait voulu passer à San-Fernando sans être connu…