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SAN-FERNANDO.

chouc, des gommes et des fruits, principalement ceux du palmier piriguao.

C’est de ce village que partit en 1882, le docteur Crevaux, accompagné de M. Lejeanne, pour remonter le Guaviare, — exploration qui devait ajouter une victime de plus à la nécrologie des découvreurs modernes.

La population de San-Fernando comprend quelques familles d’origine blanche, un certain nombre de nègres et d’Indiens, ces derniers appartenant pour la plupart à la tribu des Banivas. L’autorité du Président de la République et du Congrès est dévolue à un gouverneur, qui ne dispose que d’un chiffre très restreint de soldats. Cette milice est surtout affectée à la police du territoire et aux réquisitions d’hommes, lorsqu’il est nécessaire de mettre à la raison les bandes qui infestent les rives de l’Orénoque et de ses tributaires.

Les Banivas méritent d’être remarqués entre toutes les races autochtones du Venezuela. Leur constitution physique les place au-dessus de leurs congénères, — corps robuste, membres solidement attachés, physionomie qui dénote l’intelligence, sans aucune dépression de la face, sang généreux qui coule sous leur peau rougeâtre, ardeur de leurs yeux présentant une légère obliquité. Au point de vue moral, ils l’emportent aussi sur les autres indigènes, étant industrieux, soit qu’ils exercent le métier de bateliers, soit qu’ils confectionnent des hamacs ou des espillas employées au halage des embarcations. La bonté et l’honnêteté de ces Indiens les recommandent aux voyageurs qui ont besoin de leurs services. Ils sont pêcheurs, ils sont chasseurs, ils s’entendent à la culture et à la récolte du caoutchouc. Eux aussi, sont-ils donc superstitieux ?… Non, si on les compare aux Piaroas. Ils professent la religion catholique, à laquelle les ont convertis les missionnaires, mais y mélangent parfois des pratiques locales difficiles à déraciner.

Bien que les habitations de San-Fernando ne méritent guère que le nom de cases ou de paillotes, il en est parmi elles qui offrent un certain confort.