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le sphinx des glaces

tempérées, lorsqu’elles atteignent leur maximum de culmination. Il est même admis, — fait non constaté, je le sais — qu’au moment où une violente décharge d’électricité positive s’opère dans les régions arctiques, les régions antarctiques sont soumises aux décharges d’électricité de nom contraire.

Eh bien, ces courants continus aux pôles, qui affolent les boussoles, doivent posséder une extraordinaire influence, et il suffirait qu’une masse de fer fût soumise à leur action pour qu’elle se changeât en un aimant d’une puissance proportionnelle à l’intensité du courant, au nombre de tours de l’hélice électrique, et à la racine carrée du diamètre du massif de fer aimanté.

Précisément, on pouvait chiffrer par des milliers de mètres cubes le volume de ce sphinx, qui se dressait sur ce point des terres australes.

Or, pour que le courant circulât autour de lui et en fît un aimant par induction, que fallait-il ?… Rien qu’un filon métallique, dont les innombrables spires, sinuant à travers les entrailles de ce sol, fussent souterrainement reliées à la base dudit massif.

Je pense aussi que ce massif devait être placé dans l’axe magnétique, comme une sorte de calamite gigantesque, d’où se dégageait le fluide impondérable et dont les courants faisaient un inépuisable accumulateur dressé aux confins du monde. Quant à déterminer s’il se trouvait précisément au pôle magnétique des régions australes, notre boussole ne l’aurait pu, car elle n’était pas construite à cet effet. Tout ce que j’ai à dire, c’est que son aiguille, affolée et instable, ne marquait plus aucune orientation. Peu importait, d’ailleurs, pour ce qui concernait la constitution de cet aimant artificiel et la manière dont les nuages et le filon entretenaient sa force attractive.

C’est de cette façon très plausible que je fus conduit à expliquer ce phénomène, — par instinct. Il n’était pas douteux que nous fussions à proximité d’un aimant, dont la puissance produisait ces effets aussi terribles que naturels.

Je communiquai mon idée à mes compagnons, et il leur parut que