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le sphinx des glaces

— Et ce n’est pas Arthur Pym qui a raconté lui-même ses aventures à Edgar Poe ?…

— Non… capitaine… non ! répondit Hunt… Celui-là… à Baltimore… il n’a eu que les notes écrites par Pym depuis le jour où il s’était caché à bord du Grampus… écrites jusqu’à la dernière heure… la dernière… comprenez-moi… comprenez-moi !… »

Évidemment, la crainte de Hunt était de ne pas être intelligible, et il le répétait sans cesse. D’ailleurs, — je ne puis en disconvenir, — ce qu’il déclarait semblait impossible à admettre. Ainsi, d’après lui, Arthur Pym ne serait jamais entré en relation avec Edgar Poe ?… Le poète américain aurait seulement eu connaissance de notes rédigées jour par jour pendant toute la durée de cet invraisemblable voyage ?…

« Qui donc a rapporté ce journal ?… demanda le capitaine Len Guy en saisissant la main de Hunt.

— C’est le compagnon de Pym… celui qui l’aimait comme un fils, son pauvre Pym… le métis Dirk Peters… qui est revenu seul de là-bas…

— Le métis Dirk Peters ?… m’écriai-je.

— Oui.

— Seul ?…

— Seul.

— Et Arthur Pym serait ?…

— Là ! » répondit Hunt d’une voix puissante, en se penchant vers ces régions du sud, où son regard restait obstinément attaché.

Une telle affirmation pouvait-elle avoir raison de l’incrédulité générale ?… Non, certes ! Aussi Martin Holt poussa-t-il Hurliguerly du coude, et tous deux parurent prendre Hunt en pitié, tandis que Jem West l’observait sans exprimer son sentiment. Quant au capitaine Len Guy, il me fit signe qu’il n’y avait rien de sérieux à tirer de ce pauvre diable, dont les facultés mentales devaient être depuis longtemps troublées.