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le sphinx des glaces

l’Halbrane afin d’atteindre l’îlot Bennet, puis l’île Tsalal… Et le Ciel permette que, comme la Jane, comme les navires de Weddell, elle rencontre devant elle la mer libre !

— Si les glaces l’encombrent encore, à l’époque où notre goélette sera sur la limite de la banquise, dis-je, nous n’aurons qu’à attendre au large…

— C’est bien mon intention, monsieur Jeorling, et il est préférable d’être en avance. La banquise, c’est une muraille dans laquelle une porte s’ouvre soudain et se referme aussitôt… Il faut être là… prêt à passer… et sans s’inquiéter du retour ! »

Du retour, il n’était personne qui y songeât !

« Forward ! » en avant ! eût été le seul cri qui se fût échappé de toutes les bouches !

Jem West fit alors cette réflexion :

« Grâce aux renseignements contenus dans le récit d’Arthur Pym, nous n’aurons pas à regretter l’absence de son compagnon Dirk Peters !

— Et c’est fort heureux, répondit le capitaine Len Guy, puisque je n’ai pu retrouver le métis, qui avait disparu de l’Illinois. Les indications fournies par le journal d’Arthur Pym, sur le gisement de l’île Tsalal, doivent nous suffire…

À moins qu’il ne soit nécessaire de pousser les recherches au-delà du quatre-vingt-quatrième degré… fis-je observer.

— Et pourquoi le faudrait-il, monsieur Jeorling, du moment que les naufragés de la Jane n’ont pas quitté l’île Tsalal… Est-ce que ce n’est pas écrit en toutes lettres dans les notes de Patterson ?… »

Enfin, bien que Dirk Peters ne fût pas à bord — personne n’en doutait, — l’Halbrane saurait atteindre son but. Mais qu’elle n’oublie pas de mettre en pratique les trois vertus théologales du marin : vigilance, audace, persévérance !

Me voici donc lancé dans les aléas d’une aventure qui, selon toute probabilité, dépasserait en imprévu mes voyages antérieurs. Qui aurait cru cela de moi ?… Mais j’étais saisi dans un engrenage qui me