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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

avec l’aide de tous ses habitants, y compris le capitaine Haralan et Mme Roderich elle-même, qui dut, sur mon injonction, abandonner le chevet de sa fille.

Nous commençâmes par les combles. Nous tenant coude à coude, nous les parcourûmes de bout en bout. Puis nous visitâmes toutes les pièces, sans oublier le plus petit recoin et sans laisser entre nous aucun intervalle par lequel il eût été possible à une créature humaine de se glisser. Au passage, il est superflu de le dire, nous soulevions les rideaux, déplacions les sièges, inspections le dessous des lits et le dessus des armoires, tout cela sans quitter le contact une seconde. De chaque pièce ainsi visitée la porte était ensuite fermée, et la clef m’en était remise.

Ce travail exigea plus de deux heures, mais il fut enfin achevé, et nous arrivâmes à la porte extérieure, certains, rigoureusement certains, matériellement certains qu’aucun étranger ne pouvait être caché dans l’hôtel. Cette porte extérieure fut verrouillée, et j’en mis la clef dans ma poche. Désormais, personne n’entrerait sans ma permission, et je me promettais de faire en sorte qu’aucun intrus, fût-il cent fois invisible, ne réussit à s’insinuer incognito en même temps que le visiteur par moi reconnu et accueilli.

Et, de fait, à partir de cet instant, c’est moi, moi seul qui répondis aux coups de heurtoir. Pour remplir mon office de portier, je me faisais accompagner par le capitaine Haralan, ou, en son absence, par un domestique de confiance. L’huis n’était d’abord qu’entre-bâillé, puis, tandis que mon compagnon le maintenait à l’intérieur, je me glissais par l’hiatus que j’obturais à l’extérieur. Le visiteur était-il admis ? Nous reculions pas à pas tous les trois, serrés l’un contre l’autre, tandis que la porte se refermait peu à peu.

Nous étions évidemment en parfaite sécurité dans cette maison ainsi transformée en forteresse.