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LE PILOTE DU DANUBE.

Ladko. Abandonnant provisoirement Yacoub Ogul toujours évanoui, et suffisamment ligoté, d’ailleurs, pour que la fuite lui fût interdite en cas de retour à la vie, il remonta vers l’amont aussi vite que le permettait la nature du terrain.

Après une demi-heure de marche dans un pays complètement désert, il commençait à craindre d’être obligé de pousser jusqu’à Kilia, lorsqu’il découvrit enfin une maison bâtie au bord du fleuve.

Ce ne fut pas une petite affaire que de se faire ouvrir la porte de cette maison, qui semblait être une ferme de quelque importance. À pareille heure, en pareil lieu, une certaine méfiance est excusable, et les habitants de cette demeure paraissaient peu friands d’en permettre l’entrée. La difficulté s’aggravait de l’impossibilité où l’on était de se comprendre, ces paysans parlant un patois local que Karl Dragoch, malgré son polyglottisme, ne connaissait pas. Inventant un jargon de circonstance dans lequel des mots roumains, russes et allemands figuraient chacun pour un tiers, il réussit toutefois à gagner leur confiance, et la porte si énergiquement défendue finit par s’entre-bâiller.

Une fois dans la place, il lui fallut répondre à un interrogatoire serré, dont il sortit nécessairement à son honneur, puisque deux heures ne s’étaient pas écoulées depuis son débarquement, qu’une charrette l’avait ramené près de Yacoub Ogul.