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LE PILOTE DU DANUBE.

gardiens, soit par suite d’une convocation de M. Rona, qui multipliait les interrogatoires.

Le résultat de ces interrogatoires était toujours le même. L’instruction piétinait sur place. À chaque séance, c’était un défilé de témoins dont les déclarations n’apportaient aucune lumière. Si les uns semblaient trouver quelque vague ressemblance entre Serge Ladko et le malfaiteur qu’ils avaient plus ou moins nettement aperçu le jour où ils en avaient été victimes, d’autres niaient catégoriquement cette ressemblance. M. Rona avait beau affubler son prévenu de barbes postiches taillées selon toutes les coupes imaginables, l’obliger à montrer ses yeux ou à les dissimuler derrière les verres noirs des lunettes, il ne réussissait pas à obtenir un seul témoignage formel. Aussi attendait-il avec impatience que l’état de Christian Hoël, blessé lors du dernier attentat de la bande du Danube, permît à celui-ci de se rendre à Semlin.

De ces interrogatoires, Serge Ladko se désintéressait d’ailleurs. Docilement, il se prêtait à toutes les expériences du juge, s’affublait de perruques et de fausses barbes, mettait ou retirait ses lunettes, sans se permettre la plus petite observation. Sa pensée était absente de ce cabinet. Elle restait dans sa cellule, où le barreau qui le séparait de la liberté sortait peu à peu de la pierre.