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UN PORTRAIT DE FEMME.

enthousiasmé un peintre. Mais un policier n’est pas un artiste, et ce n’est pas d’admiration pour ce ravissant visage que battait le cœur de Karl Dragoch. À peine même s’il en avait regardé les traits. À vrai dire, il n’avait rien vu de ce portrait, rien qu’une simple ligne d’écriture en langue bulgare tracée au bas de la photographie. « À mon cher mari, Natcha Ladko », tels étaient les mots que pouvait lire Karl Dragoch éperdu.

Ainsi, ses soupçons étaient justifiés, et logiques ses déductions basées sur les singularités observées. Ladko ! C’était bien avec Ladko, qu’il descendait le Danube depuis tant de jours. C’était bien ce dangereux malfaiteur, vainement pourchassé jusqu’alors, qui se cachait sous l’inoffensive personnalité du lauréat de la Ligue Danubienne.

Quelle allait être la conduite de Karl Dragoch après une pareille constatation ? Il n’avait pas encore pris de décision, quand un bruit de pas sur la berge lui fit rejeter vivement le portefeuille au fond du coffre dont il rabattit le couvercle. Le nouvel arrivant ne pouvait être Ilia Brusch parti depuis dix minutes à peine.

« Monsieur Dragoch ! appela une voix au dehors.

— Friedrick Ulhmann ! murmura Karl Dragoch qui parvint péniblement à se mettre debout et sortit en chancelant de la cabine.

— Excusez-moi de vous avoir appelé, dit