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Son plan devait réussir.

Ce fut le 4 septembre que Dillon arriva au défilé des Islettes. Dumouriez, parti après lui avec quinze mille hommes, s’était emparé de Grand-Pré, un peu avant, fermant ainsi le principal passage de l’Argonne.

Quatre jours après, le 7, le général Dubourg se portait au Chêne-Populeux, afin de défendre le nord de la forêt contre toute invasion des Impériaux.

Aussitôt on se hâtait de faire des abatis, de construire des retranchements, de palissader les sentiers, d’établir des batteries pour clore ces défilés. Celui de Grand-Pré devint un véritable camp, avec ses troupes disposées sur l’amphithéâtre des hauteurs et dont l’Aire formait la tête.

À ce moment, sur cinq des portes de l’Argonne, quatre étaient barrées comme des poternes de citadelle avec leur herse descendue et leur pont-levis relevé.

Toutefois, il restait un cinquième passage encore ouvert. Celui-là avait paru si peu praticable, que Dumouriez ne s’était pas hâté de l’occuper. Et, j’ajoute que c’est précisément vers ce passage que nous conduisait notre mauvaise fortune.

En effet, le défilé de la Croix-aux-Bois, situé entre le Chêne-Populeux et Grand-Pré, à égale distance de l’un et de l’autre — dix lieues environ — allait permettre aux colonnes ennemies de pénétrer à travers l’Argonne.

Et maintenant, je reviens à ce qui nous concerne.

C’est le 13 septembre, au soir, que nous arrivâmes sur la pente latérale de l’Argonne, après avoir évité de traverser les villages de Briquenay et de Boult-aux-Bois, qui devaient être occupés par les Autrichiens.

Comme je connaissais les défilés de l’Argonne pour les avoir parcourus plusieurs fois, lorsque j’étais en garnison dans l’Est, j’avais précisément choisi celui de la Croix-aux-Bois, qui me semblait offrir plus de sécurité. Même, par excès de prudence, ce n’était pas le