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des Carpathes ? reprit le docteur, dont la face rubiconde était devenue très pâle.

— Vous ne sauriez vous en dispenser, répondit catégoriquement maître Koltz.

— Je vous en prie… mes bons amis… je vous en prie… raisonnons, s’il vous plaît !…

— C’est tout raisonné, répondit Jonas.

— Soyez justes… À quoi me servirait d’aller là bas… et qu’y trouverais-je ?… quelques braves gens qui se sont réfugiés au burg… et qui ne gênent personne…

— Eh bien, répliqua le magister Hermod, si ce sont de braves gens, vous n’avez rien à craindre de leur part, et ce sera une occasion de leur offrir vos services.

— S’ils en avaient besoin, répondit le docteur Patak, s’ils me faisaient demander, je n’hésiterais pas… croyez-le… à me rendre au château. Mais je ne me déplace pas sans être invité, et je ne fais pas gratis mes visites…

— On vous paiera votre dérangement, dit maître Koltz, et à tant l’heure.

— Et qui me le paiera ?…

— Moi… nous… au prix que vous voudrez ! » répondirent la plupart des clients de Jonas.

Visiblement, en dépit de ses constantes fanfaronnades, le docteur était, à tout le moins, aussi poltron que ses compatriotes de Werst. Aussi, après s’être posé en esprit fort, après avoir raillé les légendes du pays, se trouvait-il très embarrassé de refuser le service qu’on lui demandait. Et pourtant, d’aller au château des Carpathes, même si l’on rémunérait son déplacement, cela ne pouvait lui convenir en aucune façon. Il chercha donc à tirer argument de ce que cette visite ne produirait aucun résultat, que le village se couvrirait de ridicule en le déléguant pour explorer le burg… Son argumentation fit long feu.

« Voyons, docteur, il me semble que vous n’avez absolument rien